Collectif

Présenter le GRAC, c’est nécessairement souligner d’emblée sa dimension collective et ses attachements hétérogènes. Si nos recherches doctorales portent ou ont porté sur des terrains aussi divers que des collectifs d'habitants, des conteurs, des amateurs de punk-rock ou des travailleuses du sexe, nous avons en commun d'être ou d’avoir été inscrits en doctorat de sociologie à l’Université Lyon II et à l'Université Jean Monnet de Saint-Étienne, plus exactement au CRESAL (Centre de Recherche et d'Étude en Sociologie Appliquée de la Loire, devenu aujourd’hui Centre Max Weber). Au sein du CRESAL, nous avons pu tout à la fois éprouver l'intérêt pour la sociologie pragmatique, trouver un espace pour penser des objets de recherche considérés comme peu légitimes ou marginaux, mais aussi faire exister la possibilité d'un collectif entre doctorants.

Mais le CRESAL et l'université sont loin d'être les seuls lieux à partir desquels notre collectif s'est constitué. Les ateliers de l’Université Solidaire, qui ont eu lieu en 2003 et 2004 à la Condition des Soies à Lyon, et qui faisaient se rencontrer chercheurs, militants et habitants autour d'expériences d'auto-organisation ont également compté pour nous. Aussi bien que ce squat de concert à Villeurbanne au sein duquel nous avons organisé entre 2005 et 2006 un séminaire traitant des « politiques du corps ». Les mouvements universitaires du CPE, de la LRU et celui des enseignants pendant l’hiver 2009 ont également été des moments importants pour nous, nous donnant l'occasion d'articuler encore autrement nos réflexions. Ces différents lieux et moments importent puisque ce qui nous réunit, ce sont bien ces chemins de traverse entre une certaine manière de pratiquer la sociologie et une certaine manière d’habiter le monde.

Le GRAC s'est constitué comme association en 2006 et s'est transformé en SCOP en 2010. Depuis  notre création, nous tentons de pratiquer la recherche collective hors de l'université, nous répondons à des appels d’offre et restons ouverts à la commande publique. L'économie de la coop' est relativement informelle - nous sommes cinq et travaillons ensemble sur toutes les recherches - et de ce fait ressemble fort peu à celle d'un  laboratoire de recherche.

Plutôt que des domaines voire même des axes de recherche que nous aurions clairement circonscrits a priori, ce qui se dessine à force de bricolages, au fil de nos expériences de recherche, c’est davantage une politique de la recherche et de la connaissance qui nous amène à prêter attention à certaines dimensions de la pratique, celles qui ont trait à l’usage ou à l’ordinaire, aux formes d’auto-organisation et à l'expérimentation, enfin et surtout aux savoirs situés. Cette politique se manifeste par le souci de coproduire les connaissances avec les personnes auprès desquelles nous menons l’enquête.

Ainsi, du côté des recherches portant sur le travail social, et plus particulièrement au sein de structures d’hébergement, notre attention porte moins sur les pratiques formalisées des salariés, que sur la part informelle et quotidienne de leur travail. Nous proposons de parler de « gestion de l’ineffable » pour qualifier le souci du « quotidien » dont les travailleurs sociaux rencontrés font preuve. Nous sommes particulièrement sensibles à la manière dont ce souci redéfinit les relations qu’ils entretiennent avec les personnes accueillies, également aux solidarités qui peuvent se tisser entre celles-ci. Ce faisant, il s’agit de prendre la mesure de ce que, suivant bien des travailleurs sociaux, la structure d’hébergement peut être requalifiée en lieu de vie, quand bien même cette requalification ne va pas de soi et peut se heurter au cadre institutionnel d’un hébergement qui est d’abord un hébergement d’urgence. D'autre part, la  recherche qui s'élabore à la coop' se rend sensible aux formes d'émancipations qui se manifestent là où elles ne sont pas attendues, sous des formats qui ne sont pas pensés à l'avance, mais qui sont produites à partir des êtres en présence et des événements qui surviennent. Ainsi, dans ces mêmes lieux d'hébergement social, nous nous  attachons à rendre compte des tactiques des résidents qui composent avec les lieux, les règles, les contrats d'hébergement, en bref à nous situer dans ces zones que nous qualifions de bordure, parce qu'elles sont chargées d'indétermination.

Concernant les recherches portant sur des expérimentations urbaines, écologiques ou culturelles, nous poursuivons ce même questionnement, par une mise en cause des formes bien référencées de l’action collective d'une part, et par la mise au jour d'autre part d'une capacité des collectifs à s’inscrire dans la localité (à l’échelle du quartier et de la ville) et à obliger de ce fait les institutions politiques locales à faire avec eux. Nous documentons ainsi la manière dont ces collectifs expérimentaux sont engagés dans des opérations de stabilisation et d’institutionnalisation de leurs formes, et comment les institutions, lorsqu'elles laissent place au débordement, peuvent se trouver gagnées par des dynamiques propres à ces expérimentations, ensauvagées à leur contact.

Les recherches du GRAC :

En 2007, une étude sur les conditions de vie, de travail et de santé des travailleurs saisonniers en Rhône-Alpes, pour le compte de l’Observatoire Régional de la Santé de Rhône-Alpes.

De 2007 à 2009, une recherche intitulée « Ressaisir la citoyenneté aux bords du politique. Expériences marginales et expériences instituées de participation politique à l’épreuve des projets de rénovation urbaine dans trois pays : Catalogne, France et Québec », dans le cadre d’un appel d’offre du Plan Urbain Construction et Architecture « Citoyenneté urbaine : formes d’engagement et enjeux de solidarité ».

En 2008, une étude menée en partenariat avec le CRIDA (Centre de Recherche et d’Information sur la Démocratie et l’Autonomie) sur les conditions de mutualisation de deux structures d’hébergement d’urgence de l’Armée du Salut à Paris.

En 2009, l’évaluation externe d’un Foyer-logement de l’association des Petits Frères des Pauvres accueillant un public en grande précarité dans la banlieue lyonnaise.

De 2009 à 2010, une étude sur la question de la reconnaissance des compétences des personnes hébergées dans les Cités du Secours Catholique.

De 2009 à 2010, la participation à une étude de l’INRA dans le cadre du projet TERAGRI: « Agriculteurs et territoires : quelles inscriptions pour quel développement ? ».

En 2010, l’évaluation externe d’un hôtel social de l’association Espérer 95 dans le Val d’Oise.

De 2010 à 2011, une étude sur l’accompagnement de la maladie grave et de la fin de vie des personnes en grande précarité commandée par la Fondation de France dans le cadre du programme « Soigner, Soulager, Accompagner ».

De 2010 à 2013, une recherche sur des expérimentations écologiques en ville dans le cadre du programme « Concertation Décision Environnement » du Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable, intitulée « Ecoquartiers et expérimentations écologiques en ville : entre dynamique participative et logique des usages. Une étude comparative en France et Catalogne », en collaboration avec le COPSAT.

De 2011 à 2013, une étude sur des expérimentations culturelles dans les brèches de la Métropole Lyon-Saint-Étienne, entre autre financée par le PUCA et le Ministère de la Culture dans le cadre du Programme de Recherches Territorialisés en Rhône-Alpes.