Penser la santé des milieux de vie. Explorer la dissémination de l'antibiorésistance dans l'environnement

Une enquête de sociologie des sciences sur les transferts de résistances microbiens

Une enquête menée pour le SPIRAL de l'Université de Liège, en collaboration avec François Thoreau, docteur en sciences politiques et chercheur qualifié FNRS.

Cette enquête consiste à suivre des scientifiques dont l'approche n'est pas centrée sur la santé animale ou celle des humains, mais se distribue spatialement (dans tous les milieux touchés), temporellement (elle prend en compte la persistance de long terme des molécules et des microorganismes résistants) et sur une multiplicité de chaînes de transmission impliquant les activités humaines, médicales, les pratiques d'élevage, la faune et la flore sauvages, les sols, les sous-sols ou encore le cycle de l'eau.

La question à laquelle nous tentons de répondre est la suivante : comment se diffuse l'antibiorésistance ? Ce domaine de recherche est en effet en pleine phase de constitution et s'il s'est fortement développé ces dernières années autour de la question du traitement des eaux usées, l'ANSES reconnaît dans un rapport récent (2020) qu'une grande variété d'autres milieux restent encore très peu étudiés. Les principaux problèmes qui se posent dans la phénoménalisation de la diffusion de l'antibiorésistance dans les milieux tiennent aux quantités résiduelles infimes qu'elles concernent et à la complexité de leurs interactions avec les microbiotes qu'elles rencontrent. Par nature imperceptible, elle nécessite des protocoles et des instruments extrêmement sensibles et perfectionnés, elle nécessite également une attention très grande aux variables que chaque type d'environnement introduit (milieux fluides ou solides, capacité de métabolisation du sol, circulation par la faune sauvage, par l'écoulement des eaux, etc.).

Notre intérêt va particulièrement vers des scientifiques qui travaillent sur des milieux géographiques particuliers (bassins versants, zones humides1, etc.) ou sur des types de substrats particuliers (fluides : cours d'eau2, eaux usées ; ou solides : épandage de boues ou de fumiers3) et qui mettent en évidence les capacités de propagation de l'antibiorésistance à l'intérieur du vivant et les réactions encore méconnues selon la spécificité de ces milieux de vie (par exemple les interactions problématiques détectées avec les métaux lourds). Partant de là, nous serons amenés à porter attention avec ces scientifiques à des situations enchevêtrées, à une diversité de milieux et de sources d'antibiorésistance : les biocides et désinfectants en tout genre issus des eaux usées déversées par les hôpitaux et les industries, l'épandage des distillats de méthanisation ou encore le rôle joué par les oiseaux migrateurs. Nous serons également attentifs au travail réalisé par les scientifiques qui se saisissent de la question par l'intermédiaire de la catégorie de micropollution et des potentielles interactions qu'ils relèvent avec les autres micropolluants (perturbateurs endocriniens, hydrocarbures aromatiques polycycliques, polybromodiphényles éthers, etc.).

1Par exemple Marion Vittecoq, qui travaille sur la résistance aux antimicrobiens dans les zones humides de Camargue.

2Fabienne Petit travaille sur les contaminations AMR dans la Seine ; Xavier Bélanger et Christophe Merlin dans les cours d’eau.

3Comme par exemple l'équipe de l'INRAE avec laquelle travaille Dominique Patureau (Bonnot et al., 2020)

étude
2021-2023

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